La récente réforme constitutionnelle au Togo continue de susciter de vives réactions, bien au-delà des frontières du pays. Dans une analyse approfondie publiée ce jeudi 4 juillet 2024, Jeannine Ella Abatan, chercheuse senior à l’Institut d’études de sécurité (ISS) pour l’Afrique de l’Ouest, le Sahel et le Bassin du Lac Tchad, a partagé ses observations sur cette question délicate.
Mme Abatan souligne que, face à la crise politique actuelle au Togo, exacerbée par les menaces d’insécurité dans le nord du pays, “l’opposition doit réévaluer sa stratégie pour accéder au pouvoir.” Cependant, la communauté internationale doit également prendre des mesures concrètes.
“Le Groupe des Cinq (Union Européenne, France, Allemagne, Programme des Nations Unies pour le Développement et États-Unis) et les organisations régionales, notamment la CEDEAO, doivent réfléchir à leurs réponses face aux développements au Togo. Le public perçoit qu’ils ont été indulgents envers le gouvernement dans leur rôle de gestion de crise”, lit-on dans le document.
Les organisations de la société civile et les analystes, tant au Togo qu’à l’échelle régionale, critiquent la CEDEAO pour ses actions incohérentes. Dans un communiqué du 15 avril, la CEDEAO avait initialement critiqué les réformes constitutionnelles et annoncé l’envoi d’une mission exploratoire dans le pays.
“Le lendemain, elle a rétracté ce communiqué, atténué sa déclaration et annoncé l’envoi d’une mission d’enquête au Togo. Cela renforce la perception publique d’une organisation qui sert les intérêts des chefs d’État et applique des doubles standards, en fermant les yeux lorsque certains dirigeants minent la démocratie tout en réprimant les pays après des coups d’État militaires,” déclare Jeannine Ella Abatan.
“Les réformes constitutionnelles controversées du Togo risquent également de ternir davantage la réputation de la CEDEAO et de discréditer le rôle de M. Gnassingbé en tant que médiateur entre la CEDEAO et l’Alliance des États du Sahel (composée des pays récemment touchés par des coups d’État : Mali, Niger et Burkina Faso),” a-t-elle ajouté.
Mme Abatan conclut en affirmant que la CEDEAO, en coordination avec le Groupe des Cinq, doit maintenir un dialogue ouvert entre les acteurs politiques et la société civile au Togo afin de “recréer un climat de confiance”.