Togo- Il y a 34 ans, le soulèvement populaire du 5 octobre 1990: Message du MO5

Chers compatriotes, Chers militants de la Démocratie,

En ce jour commémoratif du 34 è anniversaire du soulèvement populaire du 5 Octobre 1990, journée de la jeunesse togolaise, nous voudrions avant toute chose, au nom du Mouvement Patriotique du 5 Octobre (MO5), nous acquitter d’un devoir mémoriel, celui de nous incliner pieusement devant la mémoire de nos Martyrs qui ont su mêler héroïquement le nom du Togo à leur sang.

C’est tout haut que nous leur rendons hommage. C’est aussi l’occasion de rendre un vibrant hommage aux différents acteurs de cet événement, singulièrement des patriotes atrocement torturés qui ont souffert dans leur chair et dans leur âme. Salut et hommage également au vaillant peuple togolais pour le juste combat mené depuis des décennies contre la dictature.

Chers compatriotes, les années passent, mais nous ne le dirons jamais assez : notre marche vers la démocratie est inexorable. C’est grâce à votre détermination contre l’oppression que nous avons réussi à écrire, ensemble, l’une des pages les plus significatives de notre palpitante histoire. C’est grâce à vous que l’acte héroïque et historique sans précédent du 5 Octobre 1990 a été possible. Mais aujourd’hui les desiderata du peuple demeurent sans satisfaction. Les quelques rares symboles de liberté que l’on avait cru définitivement acquis sont en danger, notamment la presse privée proche de l’opposition. La tâche reste à achever patriotiquement. Si la volonté du pouvoir dictatorial togolais est de gommer l’esprit du 5 octobre 1990 de notre histoire, notre devoir est d’inscrire cette date au fronton de la République.

Chers compatriotes, Chers militants, la révolte populaire du 5 Octobre à travers le procès LOGO-DOGLO n’est pas une simple agitation de désœuvrés venus du Ghana, comme le pouvoir Gnassingbé a voulu alors avec beaucoup de fébrilité le faire croire. Elle reste l’expression d’un ras-le-bol à jamais gravé dans la mémoire collective du peuple togolais et demeure le cri de détresse le plus audible de notre incompressible volonté de démocratie et de justice sociale. Cette mémorable date du 5 octobre 1990 a, en effet, suscité d’immenses espoirs et remis à l’ordre du jour les rêves de liberté et de grandeur des pères fondateurs qui ont posé admirablement les fondements de notre République.

Force est de constater, répétons-le, avec amertume et un sentiment de gâchis, que la rente de ces inestimables sacrifices n’est pas au rendez-vous et que 34 ans après le 5 Octobre 1990, les Togolais n’ont pas encore réussi à voir le bout du tunnel. Le Togo devient synonyme de misère. Les institutions, au cas où elles existent dans le pays, sont dévoyées et soumises entièrement au bon vouloir du prince et aux caprices du clan qui tient et enlise le pays chaque jour que Dieu fait. C’est dire que la dictature perdure dans le pays avec la complaisance et l’indifférence d’une certaine communauté dite internationale. Plusieurs militants de l’opposition sont morts en détention, d’autres contraints à l’exil ou croupissent innocemment dans les geôles de la dictature. Les manifestations pacifiques de l’opposition sont interdites ou sauvagement réprimées. Des médias jugés proches de l’opposition demeurent abusivement fermés. La répression sanglante, l’arbitraire et l’impunité ont élu domicile dans le pays depuis belle lurette.

Après 38 ans de règne du père et quasiment 20 ans de pouvoir sans réalisation significative, plongeant le pays dans un délitement structurel continu, le régime militaro-civil s’est mis en quête d’un pouvoir ad vitam aeternam, abolissant la loi fondamentale d’octobre 1992 votée à plus de 90% par le peuple togolais, qu’il tente de remplacer par une constitution de bric et de broc abusivement appelée régime parlementaire.

Et pour couronner cette politique d’inimitié et de brutalité, sans crainte du discrédit international, le régime se donne tous les moyens, y compris surtout celui d’envoyer des nervis, à une réunion non interdite, tabasser un député sénégalais de la CEDEAO et une élue togolaise d’opposition au parlement national. Le Togo glisse, glisse, glisse inexorablement sur un terrain largement déclinant.

Cependant, les vicissitudes du moment ne sauraient éteindre la flamme du 5 octobre qui certes peut baisser momentanément d’intensité. Le soulèvement populaire du 5 octobre 1990 s’inscrit dans un processus irréversible. Quelles que soient les déceptions de l’heure, la lutte pour la libération du Togo doit continuer. Nous n’aurons de cesse de le redire : notre destin est entre nos mains, pour autant que nous sachions réagir au drame que vit notre cher Togo. La Terre de nos Aïeux peut renaître de ses cendres, si nous savons reprendre l’effort de manière appropriée. Face aux graves problèmes que connait le Togo, nous n’avons pas le droit de nous verser dans des disputes futiles et dépassées qui n’ont pour résultat que de nous diviser et nous fragiliser davantage, alors que les forces démocratiques ont tout intérêt à s’unir, à dissoudre les égoïsmes et à écouter la voix gémissante du peuple écrasé.

C’est un appel à l’adresse de tous les Togolais, aussi bien de l’intérieur du pays que de la diaspora. Une diaspora éclairée par la charge des responsabilités qui se doivent d’être les siennes. Nous n’avons pas la prétention de donner des leçons, même lorsque la taille des défis nous ramène constamment au rappel du bon code de conduite qui doit prévaloir parmi les membres de la diaspora qui sont appelés à un rôle autrement plus constructif que la culture des divisions. Loin également des sirènes du tribalisme, de la haine et de l’exclusion, une diaspora qui a à cœur ses responsabilités est celle qui sait observer et acquérir le savoir-faire des pays hôtes pour le mettre au service, tôt ou tard, de la mère patrie. Elle est celle solidaire, mieux organisée et mieux structurée qui prend conscience de son devoir à l’égard de son peuple, car celui-ci attend légitimement quelque chose de positif de sa diaspora.

Chers compatriotes, Chers militants, nous devons donc ensemble nous pencher sur les graves problèmes du Togo avec conviction et réalisme. À la volonté de liberté exprimée par le peuple, les séides du pouvoir Gnassingbé répondent quasi quotidiennement par une violence indescriptible. Cela doit cesser par notre action commune. Focalisons-nous sur les tâches non accomplies par manque de cohésion ou autres raisons. Que l’amour de la patrie prenne le pas sur des considérations personnelles !

Chers compatriotes, ayons foi dans l’avenir du Togo. Seule la lutte libère !

Fait à Brême (Allemagne), le 5 Octobre 2024

Eloi Koussawo, Coordinateur Général du MO5.

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