Après 72 jours d’attente, le Chef de l’Etat Faure Gnassingbé s’est enfin décidé à nommer un nouveau premier ministre. Spécialiste reconnu du recyclage politique, il n’est pas allé chercher très loin. Faure Gnassingbé a reconduit Victoire Sidemeho Tomegah-Dogbé en poste depuis le 28 septembre 2020.
Ancienne ministre du Développement à la base, de l’Artisanat, de la Jeunesse et de l’Emploi des jeunes et Directrice de Cabinet du Chef de l’Etat, Victoire Tomegah-Dogbé avait présenté la démission de son gouvernement le 21 mai 2024 suite aux élections législatives du 29 avril 2024. Faure Gnassingbé a alors demandé au gouvernement démissionnaire de rester en place pour expédier les affaires courantes.
Après donc un long silence, le Chef de l’Etat a reconduit sa fidèle de toujours. Selon le communiqué de la présidence togolaise, Faure a procédé à cette nomination suivant les dispositions transitoires de la constitution contestée promulguée le 6 mai 2024. A l’annonce du nom de Victoire Tomegah-Dogbé jeudi, 1er août 2024 , la question que nombre d’observateurs se sont posée est : pourquoi le Chef de l’Etat a pris autant de temps pour finalement reconduire l’ancien premier ministre ?
Le bât blesse surtout quand des membres du gouvernement se retrouvent dans une situation de cumul de fonctions et/ou d’incompatibilités avec leurs fonctions depuis les élections législatives. À ce jour, plusieurs membres du bureau de l’Assemblée nationale sont toujours en poste dans le gouvernement.Plusieurs ministres y compris Victoire Dogbe siègent comme député à l’Assemblée Nationale.Ce qui va à l’encontre des valeurs démocratiques et la séparation des pouvoirs sachant qu’aucune suspension des mandats parlementaires de ces derniers n’a été officiellement annoncée.
Aussi faut-il noter, qu’un gouvernement qui n’est pas de plein exercice , a un champ d’action très limité. En effet, tout ce qui relève de la gestion ordinaire quotidienne du service public gouvernemental relève des affaires courantes. Cette notion impose au gouvernement démissionnaire de ne pas procéder à des engagements, notamment financiers, qui seraient de nature à s’imposer aux futurs gouvernants : lorsqu’un gouvernement est démissionnaire ou démissionné, les ministres ne peuvent plus engager et conduire de politiques publiques.
Le gouvernement sortant ne peut donc pas engager par principe de dépenses nouvelles qui peuvent obérer les futurs gouvernants, sauf en cas d’urgence démontrée. Cette notion a été rappelée aux ministres sortants dans une note circulaire par le Secrétaire général du gouvernement, Christian Trimua. Il faut dire que la période de gestion des affaires courantes devenait tellement longue que certains ministres ont commencé par se donner certaines libertés.
Cette longue période de gestion des affaires imposée aux pays n’est pas sans incidence. Plusieurs projets et investissements ont dû être certainement reportés. Dans cette situation, ce sont les pauvres populations qui payent toujours le plus lourd tribut. Comme toujours au Togo.
Plus dramatique , après la réactivation de Victoire Dogbé, il faudra encore patienter pour la formation du gouvernement dans « les prochains jours».
Au surplus, la cacophonie générée par le changement rocambolesque de la constitution et les sorties contradictoires controversées de certains bonimenteurs au sommet de l’Etat , montrent bien le manque de profondeur de l’équipe qui a pris en otage le Togo
A.A.
Source: Le Correcteur/Titre original: 72 jours d’attente , Victoire Dogbé maintenue, l’expression de la cacophonie ambiante et le summum de la lassitude