Observation électorale en Tunisie : La curiosité Selom Klassou

Le dimanche 06 octobre 2024, les Tunisiens étaient aux urnes pour élire leur Président. Au terme du scrutin, le Président sortant Kaïs Saïed est donné, sans surprise, vainqueur.

Pour cette élection considérée par certains acteurs comme un « faussé en faveur de M. Saïed » avec des challengers « faire-valoir », l’Union Africaine avait dépêché une mission composée de 40 observateurs. La mission est conduite par l’ancien premier ministre du Togo, Komi Selom Klassou.

Rien que l’évocation du nom de ce cacique du régime togolais à la tête de cette mission ne laisse guère de doute sur les conclusions. « La mission de l’Union Africaine note que les élections se sont déroulées de manière normale, transparente et qu’aucune infraction n’avait été constatée dans les bureaux de vote couverts par la délégation », a publié l’ancien premier ministre togolais sur les réseaux félicitant l’instance supérieure indépendante pour les élections en Tunisie pour « l’expertise dont elle a fait montre dans l’organisation du scrutin ».

Des conclusions donc « normales » venant d’homme qui n’a jamais connu une élection transparente dans son pays. Né en 1960, Selom M. Klassou, du haut de ses 64 ans, est l’un des artisans d’un régime connu pour son ingéniosité à tronquer un processus électoral conclu inéluctablement par des résultats connus d’avance. Peut-on affirmer que les résultats de la dernière élection présidentielle reflètent la volonté populaire et que les droits fondamentaux des citoyens ont été garantis ?

En effet, pour qu’une élection soit considérée comme crédible, elle doit être transparente, ouverte à tous et enregistrer un taux de participation conséquent. Dans le cas tunisien, la participation s’est établie à 27,7 % contre 45 % il y a cinq ans au premier tour. C’est le plus faible taux pour un premier tour de scrutin présidentiel depuis le renversement du dictateur Ben Ali en 2011. Les candidats qui pouvaient faire de l’ombre au Président sortant ont été écartés.

Les figures de l’opposition sont envoyées en prison et des organisations de la société civile ont vu leur accréditation d’observation rejetée.
Universitaire spécialisé en droit constitutionnel, Kaïs Saïed a été élu le 13 octobre 2019, remportant près de 73% des voix au second tour face à l’homme d’affaires Nabil Karoui. Candidat se présentant comme antisystème, Kaïs Saïed a été porté au pouvoir dans un climat politique tendu à la suite du décès du Président Caïd Essebsi. Mais quelque dix-huit mois après son élection, en juillet 2021, le Président a opéré un changement d’approche radical et engagé son pays dans un tournant autocratique en s’arrogeant les pleins pouvoirs par décret. Depuis lors, il n’a cessé de cibler de supposés ennemis intérieurs et extérieurs de toutes natures et de réprimer durement l’opposition politique et la société civile.

Kaïs Saïed a installé dans son pays, un régime qui partage de nombreux points communs avec le régime togolais. L’ancien premier Sélom Klassou s’est sans aucun doute retrouvé dans son élément. Quoi de plus normal que d’encourager l’enracinement de ce régime avec des conclusions écrites d’avance.

Source: Journal ‹‹ Le Correcteur ››

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