Cyriaque Planchon et Togo : Entre découverte et partage culturel

Cyriaque Planchon, journaliste, biographe, et enseignant de Français Langue Étrangère (FLE), a une carrière riche en expériences variées qui l’ont mené de la Normandie au Royaume-Uni, en passant par le Maroc, avant de découvrir le Togo. Son livre “TOGO” offre une plongée dans la diversité culturelle et les particularités de ce pays ouest-africain. Dans cette interview, Cyriaque partage ses inspirations, ses découvertes, et son regard sur le Togo, un pays qui l’a profondément marqué.

Cyriaque Planchon, pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel et de ce qui vous a conduit à vous installer, un temps, au Togo ?

Cyriaque Planchon: J’ai d’abord travaillé comme animateur auprès de jeunes en Normandie, ma région d’origine. Ensuite, j’ai été crêpier, serveur et barman au Royaume-Uni et en Andalousie, puis journaliste au Maroc. En 2010, une amie m’a parlé d’un article de l’association “Survie” sur “Mytro Nunya”, un centre culturel récemment ouvert par un couple franco-togolais dans le quartier Adidogomé à Lomé. Ne connaissant rien de ce pays, j’ai eu envie de participer à cette nouvelle aventure. J’ai donc contacté Zoul et Enyo, les fondateurs du centre, et je suis parti au Togo avec mon appareil photo. Aujourd’hui, je suis biographe et enseignant de FLE (Français Langue Étrangère). Ma passion pour la lecture et l’écriture continue de m’animer.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de votre séjour au Togo ?

Cyriaque Planchon: Durant ces trois mois, j’ai été constamment surpris, émerveillé, parfois choqué par ce que je voyais. Tout était si différent de la France ! Ce qui m’a le plus marqué, c’est la pauvreté, bien sûr, mais aussi la chaleur humaine des Togolais, leur accueil, leur jovialité. L’omniprésence de la religion, les pluies abondantes, la diversité des paysages… Tout cela a laissé une impression durable en moi.

Qu’est-ce qui vous a inspiré à écrire “TOGO” ?

Cyriaque Planchon: Lors du salon littéraire “La Comédie du Livre” à Montpellier, j’ai découvert la collection “Les terres des hommes” sur le stand des éditions Grandir. Ils avaient des livres sur de nombreux pays d’Afrique, mais rien sur le Togo. J’ai alors proposé aux éditeurs, Isabelle et Olivier, de combler ce manque en écrivant sur le Togo. C’est ainsi que l’idée du livre est née.

Quels aspects de la culture togolaise sont mis en avant dans votre livre ?

Cyriaque Planchon: Cette collection est destinée aux enfants à partir de 8 ans et vise à leur faire découvrir un pays dans sa globalité. J’ai donc suivi la ligne éditoriale en abordant des sujets aussi variés que l’histoire, la géographie, la faune, le climat, l’économie… Mais j’ai aussi inclus des aspects spécifiques au Togo, comme la mixité ethnique, la diversité linguistique, les tatas traditionnelles du pays Tamberma, les rites de passage comme les Évala et les Akpéma en pays Kabiyè. J’ai également consacré des pages à l’art et l’artisanat togolais, ainsi qu’à la musique contemporaine, en présentant des artistes comme King Mensah et Kokou Ekouagou. Le livre se termine avec un aperçu de la cuisine togolaise, mettant en lumière des plats et des boissons typiques.

Y a-t-il une histoire ou un événement spécifique au Togo que vous avez trouvé particulièrement fascinant et que vous avez décidé d’inclure dans votre livre ?

Cyriaque Planchon: Ce qui m’a particulièrement frappé, ce sont les marches du samedi matin en soutien à l’opposant politique Jean-Pierre Fabre. J’ai été impressionné par l’ampleur de ces manifestations, où des milliers de personnes habillées en couleur orange défilaient chaque semaine pour exprimer leur mécontentement. Malgré l’endurance et la détermination des manifestants, ces protestations n’ont malheureusement pas abouti à des changements concrets. J’ai voulu inclure cet événement dans mon livre pour montrer l’engagement politique du peuple togolais.

Comment décrivez-vous la diversité culturelle du Togo ?

Cyriaque Planchon: La diversité culturelle du Togo est foisonnante et s’exprime dans de nombreux domaines. J’ai rencontré de nombreux artistes : chanteurs, musiciens, danseurs, peintres, sculpteurs, tailleurs-stylistes, potiers, conteurs, au centre culturel Mytro Nunya. Cette richesse culturelle se manifeste aussi sur les marchés animés et colorés de Lomé et des petits villages. Bien que je n’aie eu qu’un aperçu de cette diversité, je n’ai pas pu assister à toutes les fêtes traditionnelles qui rythment la vie des Togolais, mais ce que j’ai vu m’a beaucoup impressionné.

Quels sont, selon vous, les éléments les plus uniques de la culture togolaise qui méritent d’être connus à l’international ?

Cyriaque Planchon: Étant resté seulement trois mois au Togo, je suis probablement passé à côté de nombreuses manifestations culturelles. Cependant, je pense que certaines traditions comme les danses Tchébé sur échasses ou les tatas Tamberma méritent d’être mieux connues à l’international.

Pouvez-vous nous expliquer votre processus de recherche pour ce livre ? Avez-vous rencontré des défis particuliers ?

Cyriaque Planchon: Ce livre n’est pas une simple brochure touristique. C’est un travail journalistique destiné aux enfants. Pour l’écrire, j’ai puisé dans mes souvenirs, relu le journal que je tenais chaque jour, et effectué des recherches sur internet. J’ai également demandé l’avis de mes amis togolais et de ceux qui connaissent bien le pays. L’un des défis majeurs que j’ai rencontrés a été la vérification de certaines informations, notamment les données statistiques qui variaient considérablement d’une source à l’autre.

Combien de temps a-t-il fallu pour écrire ce livre, et quelles étaient les principales étapes de sa réalisation ?

Cyriaque Planchon: J’ai consacré environ un mois à l’écriture de ce livre, travaillant quatre heures par jour. Les principales étapes ont consisté à rassembler mes souvenirs, classer les informations et les photos par thèmes, effectuer des recherches, et enfin, recouper les données. J’ai également demandé à des amis de relire et corriger mon travail, ce qui est une étape cruciale.

Comment espérez-vous que les lecteurs réagiront à votre livre “TOGO” ?

Cyriaque Planchon: Mon premier lecteur, Pablo, un garçon de 6 ans, m’a dit qu’il avait appris beaucoup de choses en écoutant sa grand-mère lui lire “Togo”. Cela m’a fait très plaisir. Ce livre a un côté éducatif, c’est vrai, mais les enfants peuvent explorer les sujets qui les intéressent sans avoir à suivre un ordre précis.

Quel impact espérez-vous que votre livre aura sur la perception internationale de la culture togolaise ?

Cyriaque Planchon: Avec seulement mille exemplaires tirés, ce livre ne changera peut-être pas la donne, mais j’espère qu’il contribuera, même modestement, à faire connaître et reconnaître la culture togolaise, au moins dans quelques foyers français.

Avez-vous des projets futurs en lien avec la culture togolaise ou d’autres cultures africaines ?

Cyriaque Planchon: Depuis mon séjour au Togo, je m’intéresse à l’éveil aux langues, au plurilinguisme, et à l’interculturalité. J’aimerais un jour proposer des activités autour de ces thèmes dans des écoles et lycées de Lomé à Dapaong. Le Togo, avec sa diversité linguistique, serait un cadre idéal pour ce projet. Mais cela reste pour l’instant un rêve.

Pensez-vous écrire un autre livre sur un sujet similaire ou explorer d’autres formes de narration culturelle ?

Cyriaque Planchon: J’ai déjà écrit un récit de voyage où je relate, jour après jour, mes trois mois au Togo. Ce pays et ce peuple continuent de m’inspirer, et je ne serais pas surpris d’écrire à nouveau sur le Togo ou un autre sujet culturel.

Avez-vous une anecdote personnelle à partager sur votre expérience au Togo qui n’a pas été incluse dans le livre mais qui vous tient particulièrement à cœur ?

Cyriaque Planchon: Je pense à la naissance du journal “émomé”, qui devait annoncer le programme du festival de rue organisé par le centre culturel “Mytro Nunya”. Le journal n’est malheureusement paru qu’après l’événement. Entre l’imprimeur qui n’avait pas d’encre et celui qui n’avait pas de papier, c’était presque comme un sketch. Une expérience unique que je n’oublierai pas !

Comment votre séjour au Togo a-t-il influencé votre vision du monde et votre travail de journaliste culturel ?

Cyriaque Planchon: Mon séjour m’a ouvert les yeux sur la richesse linguistique du Togo, avec une cinquantaine d’ethnies et autant de langues. J’ai rencontré des gens passionnés, désireux de faire bouger les choses sur les plans écologique, culturel et politique. Les veillées traditionnelles, où se mêlent chansons, contes, et danses, m’ont particulièrement marqué. Ce sont des moments de partage intergénérationnels que l’on ne trouve plus guère en Europe, où la télévision et les téléphones portables ont pris le pas sur les échanges en face à face. Cette expérience m’a permis de redécouvrir l’importance des interactions humaines directes et de la transmission orale des savoirs et des traditions. Mon travail de journaliste culturel en a été profondément influencé ; je m’efforce désormais de mettre davantage l’accent sur les histoires et les traditions vivantes des cultures que je couvre, et de valoriser les voix locales dans mes écrits.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite visiter le Togo ou en savoir plus sur la culture togolaise ?

Cyriaque Planchon: Je lui dirais de venir avec un esprit ouvert et curieux. Le Togo est un pays où la rencontre humaine est primordiale. Il est important de se laisser surprendre par ce que l’on découvre et d’engager des conversations avec les habitants pour vraiment comprendre leur culture. Je recommanderais également de prendre le temps de visiter les différentes régions du pays, car chacune a ses spécificités culturelles et ses paysages uniques. Enfin, je conseillerais de ne pas se limiter aux sites touristiques classiques, mais de s’intéresser aussi aux petits villages, aux marchés locaux, et aux manifestations culturelles pour avoir une vision complète de la richesse du Togo.

Par Richard Laté Lawson-Body

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