Avec son nouveau passeport, le Burkina Faso vient de franchir un cap décisif dans son processus de distanciation vis-à-vis de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Le 3 septembre 2024, le gouvernement a en effet officiellement lancé une nouvelle génération de passeports, marquant une rupture symbolique et pratique avec l’organisation régionale.
Cette initiative, qui va au-delà de la simple suppression du logo de la CEDEAO, soulève des questions cruciales sur l’avenir des relations du pays avec ses voisins ouest-africains.
Ce qui change avec le nouveau passeport du Burkina Faso
Le nouveau passeport du Burkina Faso se distingue par son caractère innovant. Biométrique et doté d’une puce électronique de pointe, il place le pays à l’avant-garde technologique en Afrique de l’Ouest.
Selon Parfait Louré, Directeur général de l’Office national d’identification, le Burkina Faso devient le premier pays de la région et le dixième sur le continent à adopter ce type de document d’identité ultra-moderne.
Les avantages de ce nouveau système sont nombreux : pré-enrôlement en ligne, flexibilité d’enrôlement en mode connecté ou déconnecté, transmission instantanée des données aux ambassades, et renforcement significatif de la sécurité. Ces améliorations techniques témoignent d’une volonté de modernisation et d’efficacité administrative.
Cependant, l’aspect le plus frappant de ce changement reste l’absence totale de référence à la CEDEAO sur le nouveau passeport.
Cette décision, loin d’être anodine, soulève des interrogations quant à la libre circulation des Burkinabè dans la région. Si le pays reste membre de l’Union économique et monétaire Ouest africaine (UEMOA), garantissant ainsi la libre circulation au sein de ses sept autres pays membres, la situation devient plus complexe vis-à-vis des pays non-membres de l’UEMOA, comme le Ghana voisin.
Les autorités burkinabè n’ont pas encore clarifié les modalités de déplacement vers ces pays. La possibilité d’accords bilatéraux, comme avec le Ghana, reste ouverte, mais l’éventualité d’une obligation de visa mutuelle n’est pas à exclure. Cette incertitude pourrait avoir des répercussions significatives sur les échanges économiques et humains transfrontaliers.
Il est important de noter que les anciens passeports restent valides jusqu’à leur date d’expiration, offrant ainsi une période de transition aux citoyens.
Néanmoins, cette évolution marque un tournant dans la politique étrangère du Burkina Faso, reflétant une volonté d’affirmation souveraine tout en soulevant des défis pratiques pour ses citoyens et ses relations régionales.
En définitive, ce nouveau passeport burkinabè symbolise plus qu’un simple changement administratif. Il incarne une redéfinition de l’identité nationale et des orientations diplomatiques du pays.
Les mois à venir seront cruciaux pour observer comment le Burkina Faso naviguera dans ce nouveau contexte régional, entre affirmation de son indépendance et maintien de liens essentiels avec ses voisins ouest-africains.