Un projet de mariage de masse de 100 orphelins, parrainé par un élu local dans le nord-ouest du Nigeria, a été annulé après avoir suscité un vif débat dans le pays autour des normes religieuses et culturelles.
Abdulmalik Sarkindaji, porte-parole de l’assemblée locale de l’État du Niger, avait prévu d’organiser fin mai le mariage d’orphelins ayant perdu des membres de leur famille lors d’attaques de villages par des gangs lourdement armés, appelés localement « bandits », avant de faire marche arrière le mardi 14 mai 2024, face aux critiques.
Les mariages de masse sont communs au Nigeria, en particulier dans le nord conservateur du pays, majoritairement musulman, pour aider les plus pauvres à s’unir dans un pays où près de la majorité de la population vit avec moins de deux dollars par jour.
Mais le projet de ce membre du parti au pouvoir, le Congrès des progressistes (APC), annoncé la semaine dernière, s’est heurté à la résistance de la ministre de la Condition féminine et d’autres fonctionnaires, disant craindre que certaines des participantes au mariage soient mineures ou utilisées à des fins lucratives.
Le mardi 14 mai, la ministre de la condition féminine, Uju Kennedy-Ohanenye a demandé une enquête sur l’âge, le consentement au mariage et l’identité des participants.
« C’est totalement inacceptable », a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse. « J’ai fait une requête à la police (…) et j’ai déposé une demande d’injonction pour l’empêcher de faire ce qu’il a l’intention de faire », a-t-elle ajouté à propos de M. Sarkindaji.
Abiodun Essiet, assistante spéciale de la présidence chargée de l’engagement au sein des communautés, a également appelé les autorités nigérianes à inscrire les participantes au mariage de masse à des programmes d’autonomisation.
« Je ne suis pas opposée au mariage des orphelins de plus de 18 ans s’ils donnent leur consentement au mariage, mais je suis contre le mariage des mineurs. Laissons les enfants être des enfants », a-t-elle écrit sur le réseau social X.
Aucun détail n’était disponible dans l’immédiat sur l’âge des participants.
– « De bonne foi »-
Peu après les remarques de la ministre, Abdulmalik Sarkindaji a déclaré à la presse qu’il faisait marche arrière, et laissait les familles décider de la tenue ou non du mariage de ces jeunes.
« Le mariage de ces orphelins est annulé », a-t-il déclaré aux journalistes mardi. « J’ai agi de bonne foi », a-t-il assuré.
Il a toutefois critiqué la ministre de la Condition féminine affirmant que n’étant « pas originaire du nord » du Nigeria, elle ne comprenait pas les difficultés auxquelles sont confrontés les habitants de cette région.
« La ministre devrait s’informer sur mon identité et sur la manière dont j’ai aidé mon peuple », a-t-il déclaré. M. Sarkindaji a reçu le soutien de l’organisation des imams du Nigeria et d’autres groupes musulmans, qui ont accusé la ministre d’avoir outrepassé ses fonctions, et ont demandé sa suspension.
« Nous pensons qu’elle a fait ces déclarations en tant que non-musulmane. Si elle était musulmane, elle n’aurait pas tenu ces propos », a estimé Mahmud Lawal Murshid, président de la société des étudiants musulmans de l’État du Niger.
En janvier, Muktar Aliyu Betara, un élu nigérian de l’État de Borno, avait parrainé un mariage collectif pour 180 jeunes filles de sa circonscription, âgées de 17 à 18 ans, qui avaient perdu leurs parents lors de l’insurrection jihadiste qui frappe cette région.
M. Betara avait pris en charge toutes les dépenses liées au mariage, car les familles des jeunes mariées n’avaient pas les moyens de les assumer.
L’année dernière, l’État de Kano, dans le nord-ouest du Nigeria, avait financé et organisé un mariage de masse pour 1.800 couples.
Avec AFP