Togo : Le cas Steeve Rouyar, miroir d’un régime né d’un crime fondateur

L’arrestation de Steeve Rouyar, jeune Français originaire de Guadeloupe, le 6 juin 2025 à Lomé, n’a rien d’anecdotique. Elle s’inscrit dans une tradition bien ancrée de répression politique au Togo, où toute voix dissidente est perçue comme une menace à faire taire. Mais au-delà du cas individuel, elle met en lumière les racines profondes d’un système autoritaire solidement enraciné depuis plus de soixante ans, avec la complicité silencieuse parfois active de la France.

Depuis le début du mois de juin, le Togo est secoué par une vague de contestation populaire. Une jeunesse venue de tous les horizons a envahi les rues pour dénoncer une réforme constitutionnelle imposée sans débat, la flambée des prix de l’électricité et une précarité devenue insupportable. Face à cette mobilisation, le régime a répondu par la force : arrestations arbitraires, détentions sans jugement, coupures ciblées d’Internet, et une stratégie d’intimidation généralisée.

C’est dans ce climat de tension que Steeve Rouyar a été interpellé, accusé de complot contre la sûreté de l’État et de troubles aggravés à l’ordre public. Sa détention prolongée, sans justification crédible, illustre la dérive d’un pouvoir qui ne tolère ni regard extérieur ni voix discordante.

Mais ce pouvoir ne s’est pas construit en vase clos. Il est l’héritier direct du coup d’État du 13 janvier 1963, jour où Sylvanus Olympio, père de l’indépendance togolaise, fut assassiné. Ce crime, perpétré par Étienne Gnassingbé Eyadéma — ancien combattant de l’armée française revenu des guerres coloniales en Algérie — porte la marque de l’impérialisme français, inquiet de voir un dirigeant africain vouloir rompre avec le franc CFA et affirmer une souveraineté pleine et entière. Depuis ce jour, la France n’a cessé de soutenir, discrètement ou ouvertement, le régime des Gnassingbé, père et fils, au nom de ses intérêts géostratégiques et économiques.

Aujourd’hui encore, face à la détention injustifiée de Steeve Rouyar, la France garde le silence. Aucun communiqué, aucune pression diplomatique, aucun geste de soutien. Ce mutisme n’est pas neutre : il est complice. Il rappelle que les intérêts de la République française l’emportent trop souvent sur les principes qu’elle prétend incarner.

Mais le peuple togolais ne se résigne pas. Le samedi 30 août 2025, une grande marche citoyenne est prévue à travers tout le Togo et dans la diaspora. À Paris, le rassemblement aura lieu à la place de la République, symbole des luttes démocratiques. Les Togolais de France y lanceront un appel clair : la fin de la dictature des Gnassingbé et le départ immédiat de Faure Gnassingbé. Ce cri du cœur, porté par des milliers de voix, résonnera comme un acte de résistance et d’espoir.

Steeve Rouyar doit être libéré. Non parce qu’il est Français, mais parce qu’il est innocent. Et parce que son cas révèle l’urgence de briser le cycle de l’impunité et de l’ingérence. Le peuple togolais mérite mieux qu’un régime né d’un assassinat. Il mérite justice, vérité et liberté.

Par la Redaction letogolais.com

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