Alors que nombre d’observateurs pensaient que le régime de Lomé a tourné définitivement la page des violences politiques, ils ont été désagréablement surpris le dimanche 29 septembre 2024.
Le député et panafricaniste sénégalais Guy Marius Sagna à Lomé dans le cadre d’une session du Parlement de la CEDEAO qui participait à une rencontre organisée par des acteurs politiques togolais a été violenté par des sbires dont l’affiliation ne fait guère de doute. Paradoxalement, le pouvoir de Lomé s’active depuis plusieurs mois pour organiser un congrès panafricain.
En plus du député de la CEDEAO, des journalistes venus couvrir la rencontre et des acteurs politiques togolais dont la députée Brigitte Adjamagbo-Johnson ont été violemment agressés. Les images chaotiques démontrant la violence et la préméditation de cette agression ont fait le tour du monde. Du Togo au Sénégal, cet acte primitif orchestré par des nervis a été unanimement condamné.
Pour l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) de Jean-Pierre Fabre, le régime de Lomé est le seul responsable de cet acte ignoble. « Le pouvoir RPT/UNIR a manifestement orchestré, encadré et supervisé la grossière agression », dixit le parti dans un communiqué. « La violente charge contre les participants à la rencontre du 29 septembre et notamment contre le député Sagna malgré son immunité au titre de député à l’Assemblée Nationale du Sénégal et à l’Assemblée parlementaire de la CEDEAO, illustre le plein retour de notre pays au régime de terreur de parti unique, parti-Etat que les Togolaises et les Togolais espéraient ne plus jamais vivre », a souligné l’ANC avant d’ajouter que « cette violence à ciel ouvert, combinée avec les dernières dérives électorales et constitutionnelles qui ambitionnent d’installer un pouvoir monarchique, devrait achever de convaincre l’opinion nationale et l’opinion internationale que le système RPT-UNIR reste un danger pour les droits et libertés fondamentales au Togo ».
Le député Sagna « paie » pour sa critique
Au Parlement de la CEDEAO, le député Guy Marius Sagna met les pieds dans le plat depuis plusieurs semaines. Il ne se prive d’aucune occasion pour dire ses vérités aux Chefs d’Etat de la CEDEAO dont Faure Gnassingbé et Alassane Ouattara. « L’Afrique n’est pas pauvre. Ce sont ses dirigeants qui l’appauvrissent en pillant ses ressources et en ne distribuant pas aux populations ces ressources. Ils préfèrent garnir leurs comptes en Europe et laisser la population crever de faim », a notamment dénoncé le député sénégalais en juillet 2024. Ce qui lui a valu une altercation avec la députée ivoirienne Adjaratou Traoré.
Des critiques acerbes qui ne passent pas à Lomé où le régime du père en fils visiblement l’attendait impatiemment. « Depuis quand rencontrer son représentant au Parlement de la CEDEAO, est-il un crime ? Des nervis, payés par le régime de Faure Gnassingbé, ont agressé des Togolais et des députés. C’est gravissime. Si un député de la CEDEAO, bénéficiant de ses deux immunités, peut être attaqué, qu’en est-il des citoyens togolais ? », s’est-il indigné. Pour lui, cet incident révèle que tous les Togolais vivent sous une menace constante : « Si un parlementaire en session peut être bastonné, alors tout le peuple togolais est en danger ».
Violence politique comme arme de dissuasion
Au Togo, le régime du père en fils a toujours fait de la violence politique une arme pour soumettre les voix dissonantes. En effet, depuis près de 60 ans, les Togolais vivent sous une terreur indicible. Si à sous arrivée au pouvoir dans des conditions particulièrement violentes, Faure Gnassingbé a semblé changer de cap, il est vite revenu aux vieilles méthodes répressives a lui léguées par son défunt père. En plus de la violence militaire de la soldatesque à la solde du régime, les Togolais d’autres formes de violences politiques, plus larvées et discrètes : refus de la liberté d’expression, privations économiques, harcèlement moral. Aujourd’hui, la peur règne dans l’ensemble de la population. Cette terreur quotidienne est l’apanage le plus visible des violences politiques exercées par le régime de Lomé.
Malgré la réunification des attributs d’une démocrature, le régime de Lomé tente toujours de se créer une bonne image. Mais l’événement du 29 septembre, a rappelé au monde la vraie nature de ce régime qui, depuis quelque temps, fait des pieds et des mains pour soigner son image à l’international. Et le malheur pour les dirigeants, c’est que l’une des victimes ne soit autre que le farouche député sénégalais, ce panafricaniste hors pair qui fait de la lutte pour la démocratie sa préoccupation majeure. Très écouté à travers le continent, cette figure dont les propos déchainent les passions, est à même de démonter partout où, il se rend, l’image altérée du Togo ne serait-ce qu’à l’évocation de cette agression dont il a été victime à Lomé.
Discrédit
Surtout que depuis des mois, Robert Dussey ministère des Affaires Etrangères de Faure Gnassingbé se démène pour présenter l’image d’un régime fréquentable dans le cadre de l’organisation prochaine par le Togo du 9ème congrès panafricain.
L’événement annoncé depuis plusieurs mois, réunira les Africains du continent, de la diaspora, et les afrodescendants autour du thème « Renouveau du panafricanisme et le rôle de l’Afrique dans la réforme des institutions multilatérales : mobiliser les ressources et se réinventer pour agir ». « Ce Congrès appelle les jeunes d’Afrique, des diasporas africaines et d’ascendance africaine à se tenir en première ligne de la dynamique de transformation », avait expliqué le ministère des Affaires étrangères. Ce discours policé visant à redorer l’image d’un régime connu pour son obscurantisme vient de tomber à l’eau.
Par l’agression du député Sagna dont le combat pour une Afrique maître de son destin est soutenu par des milliers de jeunes à travers le continent, le régime de Lomé se jette de l’opprobre sur lui-même. Tant mieux.
Source: Journal ‹‹ Le Correcteur ››