Conflits, internet, intelligence artificielle : le président français Emmanuel Macron a plaidé ce vendredi 4 octobre 2024 pour un espace francophone uni avec une diplomatie qui défende partout la « souveraineté et l’intégrité territoriale », de l’Ukraine au Liban.
« La Francophonie est un espace d’influence diplomatique qui nous permet d’embrasser les enjeux du siècle », a-t-il déclaré à l’ouverture du 19e Sommet de la Francophonie à la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, à 60 kilomètres au nord de Paris.
« Elle est un lieu où nous pouvons ensemble porter une diplomatie qui défend la souveraineté et l’intégrité territoriale partout à travers la planète », a-t-il ajouté devant des dizaines de chefs d’État et de gouvernement, de l’Afrique à la région Indo-Pacifique.
« Qui porte le même discours aux côtés de l’Ukraine agressée aujourd’hui, menacée dans ses frontières et dans son intégrité territoriale par la guerre d’agression russe », a-t-il insisté, alors que nombre de pays du Sud ont refusé de condamner l’offensive russe contre son voisin.
« Mais qui défend une vision où il n’y a pas de place pour les doubles standards, où toutes les vies se valent pour tous les conflits à travers le monde », a-t-il poursuivi.
« Il ne pourra y avoir de paix au Proche-Orient sans solution à deux États », a réitéré le président, évoquant aussi le Liban « aujourd’hui bousculé dans sa souveraineté et sa paix ».
« Pas d’immixtion »
Faisant allusion, sans les citer, à la Chine et la Corée du Nord, Emmanuel Macron a aussi plaidé pour une région Indo-Pacifique « apaisée », « où nulle puissance ne saurait remettre en cause la paix par des provocations territoriales ou quelque reprise d’essais que ce soit ».
L’Organisation internationale de la francophonie (OIF) compte 88 États et gouvernements membres. Elle se réunit pour la première fois depuis 33 ans en sommet en France, siège de l’organisation.
« Sur cette langue, jamais le soleil ne se couche », a lancé le président français en évoquant au passage l’université Senghor, qui forme des cadres en français à Alexandrie en Égypte.
Le Premier ministre tunisien Kamel Madouri, dont le pays avait organisé le précédent sommet de l’OIF en 2022, a convenu que la communauté francophone devait « jouer son rôle dans la recherche de solutions aux crises ».
« Cependant, nous rejetons toute immixtion dans les affaires internes des pays, le principe de respect mutuel et de la souveraineté des États est sacro-saint à nos yeux », a-t-il lancé.
Dénonçant un « génocide » à Gaza, avec l’offensive israélienne en cours en réaction aux massacres perpétrés par le Hamas le 7 octobre en Israël, et les actions militaires d’Israël au Liban, il a insisté pour que l’OIF s’exprime en faveur d’un « cessez-le-feu immédiat » au Proche-Orient.
Un espace francophone uni sous la France ?
La secrétaire générale de l’OIF Louise Mushikiwabo a appelé pour sa part au retour dans « la famille francophone » du Mali, du Niger et du Burkina Faso, suspendus depuis l’arrivée de juntes au pouvoir dans ces trois pays.
L’OIF s’est progressivement muée en un « bloc » politique à l’influence encore « modeste » mais croissante, a-t-elle également souligné dans un entretien avec l’AFP.
Elle a en revanche réfuté toute domination de l’organisation par la France. « La Francophonie n’est pas la Françafrique et la Francophonie n’est pas la France », a-t-elle asséné.
Les pays membres de l’OIF ont lancé « l’Appel de Villers-Cotterêts », invitant les grands acteurs du numérique à « bâtir un espace plus sûr et plus divers » sur internet et à « lutter contre tous les discours de haine ». La Francophonie doit aussi être au rendez-vous de l’intelligence artificielle, a dit Emmanuel Macron.
Le président français a aussi annoncé le lancement d’une « collection d’œuvres littéraires de référence de la Francophonie qui seront rendus disponibles en plusieurs langues », en arabe pour commencer, et « distribués sous format papier à deux dollars ».
Il a invité les jeunes entrepreneurs à compter sur le français comme vecteur dans les relations commerciales alors que le nombre de francophones – plus de 300 millions de personnes actuellement – devrait doubler dans les prochaines décennies, et évoqué le prochain lancement d’une Alliance francophone de la propriété intellectuelle.
En 2025, la Cité de Villers-Cotterêts deviendra « un laboratoire d’excellence pour former des enseignants du et en français, de futurs cadres francophones de l’éducation, des traducteurs, des interprètes tout en accueillant en résidence chercheurs et experts en didactique », a-t-il ajouté.
Avec AFP